DÉCONFINEMENT – LUNDI 11 MAI
Lundi 11 mai 2020 débutent les Saints de Glace, durée : 3 jours
Cette croyance populaire remontant au Moyen-Age annonce un risque de froid et de gelée. Cette période demeure connue par les jardiniers, peut-être moins par les jeunes personnes qui me lisent !
Ce pourrait être la rentrée de septembre après deux mois d’été. Qui nous dit quel jour on est ? Quel mois ? Aujourd’hui, lundi 11 mai, c’est le jour du déconfinement.
Le 1er matin, chaque jour est un premier matin, pour qui veut « on » parle de reprise.
Certains n’ont pas arrêté de travailler, de se déplacer, d’autres poursuivent le télétravail, d’autres encore ne savent pas. Les enfants iront-ils à l’école ?
Finalement c’est facultatif, pour rappel, il est facultatif de s’y rendre, pas de s’instruire. L’incertitude règne de façon palpable, nous voici confronté à l’incertitude.
Alors que la société de consommation et d’hyperconnection nous l’avait fait presque oublier. Oubli intentionnel.
Plus d’attestation, Ah ! Oui ça c’est réel. Mais qu’est-ce que ça change dans notre comportement de citoyen responsable ? Allons-nous nous précipiter au Monop’, chez Kleber, à Casto… Chez le coiffeur, peut-être… Voulons-nous dorénavant faire la queue ?
Brutalement, un 17 mars, le confinement nous a fait découvrir nos vies à une autre échelle, échelle minuscule, d’abord l’échelle du logement, puis l’échelle des 1 km autour de chez soi. Désormais nous passons à l’échelle des 100 kms.
J’emprunte cette jolie métaphore au géographe Jacques Lévy. Également, un titre de ses ouvrages : penser l’espace pour lire le monde.
A de nouvelles échelles subies, nous avons innové, inventé, débuté, fouillé, élagué, jeté…
Combien nos ressources sont nombreuses ! Quelle joie de le (re)découvrir !
A ces nouvelles échelles subies, nous avons créé de nouveaux espaces de vie, rétrécissement, ouverture, adaptation, installation, rupture… Ces mouvements immobiles ont été fatigant psychiquement, ne prenons pas cela à la légère.
Nous allons poursuivre créativement plutôt qu’avec servilité.
Une façon d’habiter l’espace en cohérence avec la nécessité sanitaire, car il s’agit bien de vivre.
Si tous les gestes barrières, distanciations sociales, port de masques sont parfaitement respectés, aurons-nous retrouvé le chemin de la vie ?
Oui, nous allons aménager autrement nos bureaux, nos salles de pauses, de réunions, les salles de classes. Pour autant, pourrions-nous aménager l’espace de nos vies de façon à communiquer avec l’autre au-delà des masques, le penser, l’apprendre, l’explorer, parler avec nos mains, notre corps, l’inclinaison de la tête, remplacer un sourire invisible par un ton de voix… Pourrions-nous nous rappeler que les espaces de vie portent bien leur nom ?
Il s’agit alors de les faire vivre sans machine à café, sans terrasse, ni cinéma, ni rassemblement. Comment ? C’est à inventer.
Quand un géographe, spécialiste de géographie politique, emploie des mots qui inspirent des croquis, c’est que la géographie est aussi poésie.
Elle ne peut être réduite à un aplat rouge et vert coupant notre pays en deux.
A nous de ne pas tourner une page, pour en ouvrir une autre sans lien. 2 mois à mettre en place quelque chose qui tient sur un fil. Apprendre à vivre à une autre échelle.
Ces mouvements immobiles ont été fatigant psychiquement. Nous sommes contraints à revoir notre façon de concevoir notre vie quotidienne, notre vie, son sens.
Contraints avec inventivité et joie est possible. Du mieux que nous le pouvons être/demeurer/devenir les acteurs de nos vies. Il est temps.
Être acteur c’est se faire confiance. Permettre de penser la situation, pour se sentir valorisé dans ses compétences.
Être acteur c’est pouvoir faire confiance à l’autre qu’il puisse être valorisé dans ses compétences.
Créer une continuité du lien. En tant qu’adulte en responsabilité.
En ce lundi matin pluvieux, regardons cette belle pluie gaillarde et nécessaire.
Valérie Fichet